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Chantiers numériques dans les soins de base

Personne dans le domaine des soins de base ne voudrait se passer du numérique. Mais si l’on veut accroître la qualité des prestations des médecins de famille et tirer davantage profit des ressources humaines, des changements sont requis.

Dr. med. Philipp Tschopp, médecin de famille et directeur d’un cabinet de groupe à Bâle

18. février 2022

Pour comprendre où le bât blesse dans les soins de base, il faut se remémorer l’évolution des dernières années. Lorsque j’ai repris un cabinet médical à Bâle en 2003, nous n’avions pas encore d’ordinateur. Ce n’est qu’en janvier 2004 qu’il est devenu nécessaire pour pouvoir facturer avec TARMED. Dans les années qui ont suivi, la transition numérique s’est opérée au niveau des appareils de laboratoire, des dossiers médicaux et des agendas, sans parler des nombreux échanges d’e-mails avec les hôpitaux et de la communication avec les patients. Par la suite, des logiciels tels que MediData (e-factures), mediX (processus de soins) et FIRE (recherche) sont venus s’ajouter. Des plateformes en ligne pour les consultations 24h/24 et 7j/7 avec onedoc sont apparues, en plus des solutions cloud pour les rapports et les ordonnances électroniques. Il est ainsi devenu possible de prendre rendez-vous en radiologie à toute heure du jour et de la nuit. Le partage de documents entre la télémédecine et le médecin de famille avec le produit Multimed de la CSS a également permis de responsabiliser les patients. Bref, en 2001, le cabinet médical traditionnel ressemblait à une vieille Opel Manta alors qu’en 2022, il se compare à une Mercedes électrique. Mais malgré toutes ces avancées, le numérique dans les soins de base a encore de grands chantiers devant lui.

Une question de financement

Aujourd’hui, les coûts d’entretien d’un système informatique se situent entre 1000 et 9000 francs par mois, selon la taille du cabinet. A cela s’ajoutent les frais de logiciels et de licences, de mises à niveau et de personnel (p. ex. pour les tâches de numérisation). Ce poste croissant dans le budget d’un cabinet médical ne se reflète pas dans le chiffre d’affaires des soins de base, qui demeure stable. Le parc informatique ne s’amortit pas avec l’utilisation de TARMED. Le risque économique pour les indépendants s’est accru. Dans ce contexte, les jeunes médecins hésitent à ouvrir des cabinets de médecine de premier recours.

La sécurité informatique comme menace

La cybercriminalité menace de plus en plus nos cabinets de médecins de famille, même à petite échelle, et beaucoup se sentent dépassés par la situation. C’est pourquoi chez mediX nord-ouest, nous offrons une formation complète sur la sécurité informatique à tous les collaborateurs du cabinet. Et les résultats sont encourageants. Toutefois, le budget à six chiffres consacré à cette formation n’est pas amorti par TARMED.

«En 2001, le cabinet médical traditionnel ressemblait à une vieille Opel Manta alors qu’en 2022, il se compare à une Mercedes électrique.»

Philipp Tschopp

Des idées confrontées à la réalité

Les projets prometteurs dans le domaine informatique passent rarement le test en cabinet. Dans le cadre d’un projet de master réalisé en collaboration avec la HEC de Berne, deux étudiantes ont développé dans mon cabinet un chatbot pour l’anamnèse. L’objectif était d’accroître l’efficacité et d’utiliser le temps d’attente de façon intelligente. Malheureusement, seuls quelques-uns de nos patients ont été d’accord d’utiliser cet outil pourtant simple. Il serait urgent de former nos clients, en particulier les personnes âgées plus vulnérables, à l’utilisation des applications informatiques modernes.

Les big data ne règlent pas tout

Depuis peu, des partenaires d’assurance nous proposent des analyses de données afin de faire la lumière sur notre comportement en matière de directives ou de coûts. D’une part, analyser les big data demande beaucoup de temps. D’autre part, si l’analyse n’est pas suffisamment rigoureuse, elle peut être explosive et détruire de précieuses relations de confiance.

L’envers de la transition numérique

Même les assistants médicaux fraîchement diplômés, qui sont familiers du numérique, sont dépassés par le flux de données. Ils passent plus de temps à communiquer avec les patients, les pharmacies, les hôpitaux et les assurances qu’à réaliser des tâches concrètes telles que des prises de sang, des électrocardiogrammes, des pulsoxymétries, etc. La tendance est à l’envoi d’e-mails vite fait, ce qui renforce le stress des collaborateurs. Bien que les cabinets modernes tentent de soulager les assistants médicaux au front, dans certaines régions, le manque de personnel se fait de plus en plus criant, et le taux de rotation tend à augmenter. Dans ces conditions, l’accélération induite par le numérique représente aujourd’hui une menace pour les cabinets de médecine de premier recours.

Dr. med. Philipp Tschopp

Dr (Berne), MSc (Canada), médecin de famille depuis 1998, directeur d’un cabinet de groupe à Bâle. Président du conseil d’administration de mediX nord-ouest depuis 2006. Médecin de théâtre à Bâle depuis 2004.

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