Une responsabilité partagée
La résistance aux antibiotiques et la pénurie d’antibiotiques efficaces constituent un problème de plus en plus grave, qui est directement lié à l’utilisation généralisée, et parfois non justifiée, des antibiotiques. Il appartient non seulement à l’industrie pharmaceutique, mais aussi à la population et au corps médical de trouver des solutions. Les médecins doivent évaluer si les antibiotiques courants de premier choix peuvent être utilisés dans le cadre d’un traitement. Il est problématique d’utiliser trop rapidement des antibiotiques à large spectre (de réserve), qui contribuent au développement de résistances.
Des besoins non satisfaits
Bien que très réglementé, le marché des médicaments n’atteint pas toujours les objectifs souhaités pour la collectivité. Quelles innovations faut-il?
Les défis médicaux posés par les bactéries résistantes aux antibiotiques sont complexes:
- S’il est clair que le traitement de premier choix ne fonctionne pas, il n’est pas toujours évident de savoir qui est atteint d’une infection par de telles bactéries.
- Le traitement de deuxième choix est souvent moins efficace que le traitement de premier choix. Il doit parfois être administré sous forme de perfusion. De plus, il cause souvent davantage d’effets secondaires et de résistances.
Lors de transferts de l’étranger, les patientes et patients sont parfois porteurs de bactéries résistantes à pratiquement tous les antibiotiques. C’est pourquoi les hôpitaux devraient pratiquer des tests de détection ciblés sur les personnes qui présentent des risques. Cela permettrait de leur proposer un traitement efficace en cas d’infection et de les isoler afin d’éviter la transmission des bactéries résistantes dans les hôpitaux.
Plus les antibiotiques sont prescrits et utilisés, plus leur pourcentage de résistance augmente. Il faut donc prévoir davantage d’antibiotiques de réserve. Cependant, certains antibiotiques utilisés depuis des décennies ne sont plus produits en quantité suffisante, puisque leur distribution n’est pas rentable pour les fabricants.
Principes régissant l’utilisation des antibiotiques
Afin d’atténuer le problème de la résistance aux antibiotiques, nous appliquons les principes d’utilisation rationnelle des antibiotiques, tels que décrits dans la stratégie Antiobiorésistance (StAR). Parmi ces principes, on trouve:
- l’utilisation restrictive des antibiotiques: les antibiotiques doivent être utilisés de manière ciblée et uniquement lorsqu’ils sont vraiment nécessaires.
- le choix précis de l’antibiotique approprié, basé sur l’agent pathogène présumé. Idéalement, l’agent pathogène devrait être identifié afin de s’assurer que le traitement est efficace ou qu’il peut être encore mieux ciblé. Un antibiotique doit agir sur le site de l’infection, c’est-à-dire qu’il doit être administré selon la posologie et la durée adéquates.
- des directives actuelles, basées sur des preuves et faciles à utiliser.
- des études cliniques bien conçues et de haute qualité pour vérifier et confirmer ces preuves ou pour permettre des ajustements afin d’optimiser les directives et l’utilisation des antibiotiques.
- des antibiotiques de première ligne en quantité suffisante et sous une forme d’administration correcte (p. ex. des suspensions pour les enfants). Il s’agit d’une condition préalable, afin de recourir à l’antibiotique le plus adapté sous une forme d’administration qui permette un dosage optimal et qui soit bien toléré et ingéré par la personne (p. ex. effets secondaires, goût, etc.).
- des laboratoires de microbiologie et des centres de référence qui suivent l’évolution de la résistance.
- des mesures d’isolement dans les hôpitaux et autres établissements de santé afin d’éviter la transmission de bactéries résistantes.
- l’information aux patientes et patients, ainsi qu’à la population, sur l’action des antibiotiques et sur les situations dans lesquelles ils doivent être
utilisés.
La disponibilité, un élément clé
Il faut s’assurer que les antibiotiques prévus dans les directives sont disponibles. C’est pourquoi, dans la mesure du possible, il ne devrait pas y avoir un seul produit sur le marché pour un antibiotique, mais plusieurs. La mise en place de réserves obligatoires pourrait être envisagée en cas de pénuries présumées ou lorsque l’absence de produits thérapeutiques présente un danger. L’essentiel est qu’il y ait un échange quant à la disponibilité ou en cas de disponibilité limitée attendue. A ce titre, la base de données www.drugshortage.ch est un outil précieux pour les hôpitaux et les cliniques.